Découvrez l'histoire des migrations bretonnes vers Paris et l'Amérique (XIXe-XXe). Conseils pour retrouver vos ancêtres émigrés. Guide complet du généalogiste.
©️Bécédia - BZH
Pour tout généalogiste breton, il est presque inévitable de rencontrer dans son arbre familial une personne ayant quitté la Bretagne. Entre 1850 et 1970, environ un million de Bretons ont quitté leur région natale, transformant la péninsule en terre d'émigration massive. Deux destinations se distinguent particulièrement : Paris, où convergent les trains de la misère, et l'Amérique du Nord, terre de tous les espoirs. Comprendre ces mouvements migratoires est essentiel pour mener à bien vos recherches généalogiques et reconstituer le parcours de vos aïeux.
Au XIXe siècle, la Bretagne connaît un déclin économique brutal qui pousse des centaines de milliers de personnes à l'exil. La population de la région croît sensiblement tout au long du XIXe siècle et jusqu'à la Première Guerre mondiale, particulièrement dans le Finistère, créant une pression démographique considérable sur des terres agricoles de plus en plus exiguës.
L'industrie textile, autrefois prospère grâce à la fabrication de toiles de lin et de chanvre, s'effondre lorsque la marine à voile disparaît et que la concurrence du coton s'affirme. L'économie de la région connaît des difficultés majeures qui affectent la plupart des secteurs d'activité, en premier lieu l'industrie textile. Les ardoisières des Montagnes Noires, particulièrement autour de Gourin, cessent progressivement leurs activités.
De 1800 à 1911, la population de la Bretagne a constamment augmenté, passant de 1 848 311 à 2 601 792 habitants. Mais cette croissance démographique ne s'accompagne pas d'un développement économique suffisant. De 1872 à 1891, on compte 126 000 départs, et plus de 200 000 entre 1891 et 1911.
Pour le généalogiste, cette période correspond souvent à la disparition soudaine d'un ancêtre des registres paroissiaux bretons. Si vous cherchez un aïeul né entre 1850 et 1920 dans le centre Bretagne et que vous ne le retrouvez plus après ses 20 ans, l'hypothèse de l'émigration doit être sérieusement envisagée.
Contrairement à ce qu'on pourrait imaginer, l'émigration bretonne n'était pas un acte isolé et désespéré. Des réseaux d'entraide familiaux et de voisinage se sont développés, permettant aux migrants déjà installés d'encourager ou de faire venir d'autres compatriotes. Cette solidarité communautaire explique pourquoi certains villages bretons se sont littéralement vidés vers des destinations spécifiques.
💡 Notre conseil généalogique : si vous identifiez un ancêtre émigré, recherchez systématiquement ses voisins, cousins et parents dans les mêmes destinations. Les Bretons partaient rarement seuls.
Avec l'ouverture de la ligne du chemin de fer Paris-Nantes-Quimper inaugurée en 1863, puis l'achèvement de la ligne qui relie Brest à Paris en 1865, l'émigration bretonne vers la capitale s'intensifie durant toute la seconde moitié du XIXe siècle. Pour vos recherches généalogiques, cette date constitue un repère chronologique crucial : avant 1865, l'émigration bretonne vers Paris était limitée ; après, elle devient massive.
Arrivant par la gare Montparnasse, les nouveaux venus investissent naturellement le 14e arrondissement de Paris, qui devient peu à peu un véritable village breton dans la ville. Si votre ancêtre breton a émigré à Paris entre 1865 et 1960, commencez vos recherches dans les 14e et 15e arrondissements.
Les chiffres témoignent de l'ampleur du phénomène : en 1891, l'émigration bretonne comprenait 88 100 personnes à Paris et dans le département de la Seine, s'élevant au chiffre minimum de 100 000 en 1896. À Paris, le nombre de Bretons est estimé entre 300 000 et 500 000, constituant la plus grande communauté bretonne hors de Bretagne.
Fidèles aux habitudes de clan qu'ils apportent du pays natal, ces migrants se répartissent par groupes, suivant les affinités d'origine et de famille. Cette organisation en réseaux est précieuse pour le généalogiste : retrouver un ancêtre peut vous mener à toute une branche familiale.
Ces exilés volontaires occupent les emplois les plus pénibles. Les hommes sont nombreux à travailler au percement des tunnels du métro parisien à partir de 1898. Le concepteur du métro parisien, Fulgence Bienvenüe, était lui-même originaire de Bretagne.
Les femmes bretonnes ne sont pas mieux loties. Beaucoup travaillent comme nourrices, concierges, bonnes à tout faire ou petites marchandes de rue. Le stéréotype de "Bécassine", créé en 1905, reflète cette réalité : des jeunes femmes rurales, souvent ne parlant que le breton, employées comme domestiques par la bourgeoisie parisienne.
Face aux difficultés, la communauté bretonne s'organise rapidement. L'abbé Cadic anime une paroisse bretonne à la fin du XIXe siècle. Au tournant du XXe siècle, il fonde la première paroisse bretonne de Paris dans l'Église Notre-Dame-des-Champs, où il crée une mutuelle, des cours de français et un bulletin mensuel.
La Mission bretonne, créée par l'abbé Élie Gautier en 1947 et animée par son successeur le père Le Quemener, outre son rôle culturel, a eu une fonction d'accueil non négligeable après la Seconde Guerre mondiale. Installée depuis 1977 au 22 rue Delambre dans le 14e arrondissement, cette institution conserve potentiellement des archives précieuses pour les généalogistes.
💡Notre conseil généalogique : les registres de ces associations bretonnes, lorsqu'ils sont conservés, peuvent vous fournir des informations précieuses sur vos ancêtres parisiens : dates d'arrivée, emplois occupés, adresses successives, liens avec d'autres Bretons.
Gourin, petite ville du Morbihan située aux confins du Finistère et des Côtes-d'Armor, est devenue mondialement connue pour son émigration massive. Entre 1880 et 1970, 11 500 personnes du canton de Gourin ont franchi l'Atlantique.
Cette émigration a essentiellement eu lieu à partir du Centre-Bretagne autour de Gourin au sein d'un triangle entre Quimper, Carhaix et Loudéac. Les raisons ? La pauvreté dans les campagnes bretonnes, la diminution des besoins de main-d'œuvre pour les travaux agricoles, la fermeture des ardoisières.
Dès 1928, on dénombre environ 3000 habitants de Gourin à New York, 400 d'entre eux étant directement employés par Michelin, l'entreprise créée en 1901 au sud de New York à Milltown et qui recrutait de façon privilégiée des Bretons.
Près de 100 000 Bretonnes et Bretons sont partis aux États-Unis entre 1880 et 1980. Ce chiffre inclut les centaines de Bretonnes qui ont épousé des soldats américains lors des deux guerres mondiales, Brest ayant été un port de débarquement majeur des troupes américaines.
Entre 1945 et 1958, juste la ville de Gourin et ses alentours ont vu 4000 habitants partir pour les USA. Entre les seules années 1946 et 1955, 747 émigrants quittent Gourin, soit 13,4% de la population, dont une large part vers les États-Unis.
L'émigration s'est faite en plusieurs vagues : au début du siècle, et après la première et la deuxième Guerre mondiale. Les Bretons ont été d'abord bûcherons ou fermiers au Canada, ouvriers dans le New Jersey, et les derniers arrivés dans les années 50 ont fait carrière à New York dans la restauration.
La destination principale était New York et l'occupation à 80% était dans la restauration. Les Bretons se sont fondus dans le prolétariat des grandes villes américaines, particulièrement à New York et dans sa banlieue.
Ellis Island est une île située à l'embouchure de l'Hudson à New York. Dans la première partie du XXe siècle, c'est l'entrée principale des immigrants qui arrivent aux États-Unis. Les services d'immigration y fonctionnent du 1er janvier 1892 jusqu'au 12 novembre 1954.
Durant les 62 années d'activité, le bureau d'immigration des États-Unis y étudie 12 millions de demandes. Vos ancêtres bretons arrivés entre 1892 et 1954 sont donc passés par Ellis Island, et leurs noms figurent potentiellement dans les registres.
💡Notre conseil généalogique : les registres d'Ellis Island sont numérisés et consultables gratuitement en ligne. C'est votre première étape pour retrouver un ancêtre parti en Amérique.
Dans les années 1880, la république d'Argentine emploie des agents recruteurs en Europe, particulièrement actifs en Aveyron, au pays Basque et en centre Bretagne. Grâce à des brochures illustrées, ils présentent un véritable pays de cocagne et promeuvent les facilités du voyage ou les aides pour acquérir des terres.
Grégoire Le Clech estime à 15 000 le nombre de Bretons qui ont immigré vers l'Argentine dans la seconde moitié du XIXe siècle, dont une large partie issue du centre Bretagne. Des centaines de Bretons émigrent vers l'Argentine, dans d'autres régions que celles où les Gallois s'installent à la fin du XIXe siècle.
Cependant, beaucoup de Bretons sont décimés par la diphtérie et la typhoïde et décident rapidement de rejoindre le littoral. Cette émigration fut moins durable que celle vers les États-Unis.
Certaines familles bretonnes ont néanmoins réussi en Argentine. José Sanseau, qui avait 15 ans au moment du départ de Bretagne, épouse une Italienne et aura 11 enfants. Ses frères et sœurs fondent également de grandes familles qui s'intègrent rapidement à la bonne société argentine. L'un de ses fils, Ivan, devient maire de Piguë puis sénateur argentin en 1957.
1. Consultez les registres d'état civil bretons : une disparition soudaine d'un ancêtre des registres peut signaler un départ. Si votre ancêtre apparaît dans les registres jusqu'à ses 20 ou 25 ans, puis disparaît sans trace de décès, envisagez l'émigration.
2. Vérifiez les archives militaires : les registres de matricules militaires mentionnent parfois les changements de résidence. Consultables aux Archives départementales, ils peuvent indiquer "domicilié à Paris" ou "émigré en Amérique".
3. Recherchez dans les passeports : les demandes de passeports délivrés avant 1914 sont souvent conservées aux Archives départementales. Elles contiennent des informations précieuses : destination, motif du voyage, description physique.
4. Explorez les listes de recensement : les recensements de la population peuvent montrer la présence puis l'absence d'un individu, orientant ainsi vos recherches.
1. Archives de Paris : les recensements de population sont très utiles pour localiser un ancêtre dans les 14e-15e arrondissements. Consultables en ligne sur le site des Archives départementales de Paris pour certaines périodes.
2. Archives de la Mission Bretonne : Contactez la Mission Bretonne au 22 rue Delambre, 75014 Paris. Leurs archives peuvent contenir des informations sur votre ancêtre : inscription, participation aux activités, adresses.
3. Archives paroissiales : l'église Notre-Dame-des-Champs (rue Madame, Paris 6e) a abrité la première paroisse bretonne. Les registres paroissiaux peuvent révéler des baptêmes, mariages ou sépultures.
4. Livrets ouvriers : obligatoires au XIXe siècle, conservés aux Archives de Paris, ils peuvent révéler le parcours professionnel de votre ancêtre et ses employeurs successifs.
5. Annuaires du commerce et de l'industrie : si votre ancêtre était artisan ou commerçant, les annuaires Didot-Bottin peuvent vous donner son adresse professionnelle.
1. Ellis Island : Base de données en ligne gratuite avec plus de 22 millions de passagers (1892-1954). Recherchez par nom, mais essayez plusieurs orthographes car les agents américains transcrivaient phonétiquement les noms bretons.
2. Musée de l'émigration bretonne : le Château de Tronjoly à Gourin abrite un centre de documentation sur l'émigration bretonne en Amérique. Ils conservent photographies, documents et peuvent vous aider dans vos recherches.
3. Archives diocésaines américaines : beaucoup de Bretons se regroupaient autour de leurs prêtres. Les archives paroissiales de New York, du New Jersey et du Canada peuvent contenir des registres de baptêmes, mariages et sépultures.
4. Dossiers de naturalisation : les dossiers de naturalisation américains (USCIS) sont riches en informations généalogiques : date et lieu de naissance en Bretagne, date d'arrivée, port d'entrée, adresse américaine, profession, noms des proches.
5. Recensements américains : les recensements fédéraux américains (disponibles tous les 10 ans) sont consultables en ligne sur FamilySearch et Ancestry. Ils mentionnent le pays de naissance, l'année d'immigration, le statut de naturalisation.
6. Castle Garden : pour les arrivées antérieures à 1892, consultez les registres de Castle Garden (1855-1890), premier centre d'accueil des immigrants à New York.
1. Bases de données d'immigration : des sites argentins recensent les passagers entrés au XIXe siècle. Le site www.cemla.com (Centro de Estudios Migratorios Latinoamericanos) et d'autres bases de données en ligne peuvent vous aider.
L'émigration concernait principalement :
Les noms bretons ont pu être modifiés par les agents d'immigration américains et les employés d'état civil parisiens. Essayez toutes les variantes possibles :
- Le Gall → Legall, Le Gal, Legal, Gall
- Kermarrec → Kermarec, Kermarech, Kermarek
- Quéméneur → Quemenneur, Kemener, Quemener
Les témoins de mariage sont souvent des compatriotes. Si vous trouvez le mariage parisien ou américain de votre ancêtre, notez les noms des témoins : ce sont probablement des Bretons du même village, partis ensemble.
De nombreuses associations bretonnes à Paris et aux États-Unis conservent des archives.
Contactez :
- Breizh Amerika (pour les États-Unis)
- Les cercles celtiques et amicales bretonnes de Paris
- Les associations de Gourin et du centre Bretagne
Les journaux bretons du XIXe et XXe siècle mentionnaient parfois les départs et les nouvelles des émigrés. Consultables dans les bibliothèques départementales et sur Gallica.
Les migrations bretonnes constituent un chapitre essentiel de l'histoire démographique française et un élément souvent déterminant dans l'histoire familiale. Pour le généalogiste, comprendre ces mouvements de population n'est pas seulement un exercice académique : c'est souvent la clé pour retrouver un ancêtre disparu des registres bretons et reconstituer l'histoire complète de votre famille.
L'exode rural révèle des souffrances encore secrètes et inavouées et surtout l'extrême pauvreté de la France rurale du XIXe et du XXe siècles. Ces migrations, bien que souvent vécues comme un véritable exil, témoignent de la résilience et du courage de vos ancêtres.
L'identité bretonne, préservée en terre d'exil, facilite aujourd'hui nos recherches : les Bretons se regroupaient, créaient des associations, se mariaient entre eux, formant des communautés identifiables dans les archives. Cette solidarité communautaire est votre meilleur allié dans vos recherches.
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